mercredi 20 octobre 2010

La Déconstituante genevoise propose le retour de l'énergie nucléaire : Le glas de la Constitution

La Constituante genevoise a achevé, jeudi soir, le plombage de ses propres travaux en proposant, contre l'avis de la commission concernée, de revenir sur le bannissement de l'énergie nucléaire, inscrit dans l'actuelle constitution depuis 1986. Trois projets de nouvelles centrales nucléaires ont été déposés en Suisse, et la droite a placé Doris Leuthard à la tête du ministère concerné pour favoriser leur acceptation : Le vote de la Constituante genevoise, en faveur d'une disposition remplaçant l'interdiction du nucléaire par une recommandation creuse de d'essayer de s'en passer, est un signal dans cette même direction, mais aussi le premier son d'un glas : celui du service funèbre du projet de nouvelle constitution genevoise. Il n'y a vraisemblablement plus rien à attendre de cette assemblée, sinon qu'elle nous fasse le cadeau d'aggraver encore son cas en farcissant son texte d'autres dispositions rédhibitoires, et en facilitant notre travail le jour où il faudra dire, en votation populaire, « NON » à un texte qui, sur la plupart des points que nous jugions fondamentaux, menace de n'être qu'un véritable manifeste de régression sociale et politique.

Comment foirer une révision constitutionnelle

La révision globale de la Constitution genevoise, nous y avons été, au départ, favorables. Très favorables, même. Parce que nous le sommes au débat politique, qu'une révision constitutionnelle globale est un moment, et une Constituante un lieu, de tous les débats politiques. Mais le départ de l'exercice, déjà, aurait pu nous mettre quelques puces à l'oreille : la loi organisant l'élection de l'assemblée chargée de rédiger une nouvelle charte fondamentale de la république contenait, en germe, le résultat d'une élection à laquelle ni les étrangers, ni les jeunes de 16 à 18 ans n'ont pu prendre part, et qui ne posait pas comme condition de la présentation d'une liste que la parité des genres y fût respectée. Pour ajouter la restriction du débat au défaut initial de représentativité de la Constituante, on lui a enjoint de ne présenter au bout de son parcours qu'un seul projet alors qu'un véritable débat démocratique aurait du permettre la présentation de plusieurs projets constitutionnels concurrents. Et pour achever cette collection de handicaps initiaux, on a donné à la Constituante un délai invraisemblablement long (quatre ans...) pour rédiger un seul texte. Le résultat, on le connait : d'abord, l'élection avec un taux d'abstention considérable d'une constituante de vieux mâles revanchards, ensuite l'adoption à intervalles réguliers de thèses et de propositions régressives, parsemées de quelques gadgets technocratiques. C'est cela qui sera soumis, dans deux ou trois mois, à une consultation préalable, puis, dans deux ans, à un vote populaire. Lorsque les socialistes ont formé leur liste, pluraliste, pour la Constituante, ils ont adopté une « feuille de route » affirmant qu'ils tiendront « un certain nombre de points comme suffisamment fondamentaux pour que leur respect conditionne leur approbation du texte final ». Et d'entre ces points, au moins ceux-ci : le droit de vote et d’éligibilité des étranger-e-s au plan cantonal, l'égalité des droits entre femmes et hommes, le développement des droits sociaux justiciables, dont le droit au logement... allonger la liste serait allonger celle des manques, des trous, des impasses de ce qui aujourd'hui, deux ans après l'élection de la Constituante, sort de ses travaux : un échec, programmé par la la loi instituant la Constituante et parfait par le choix délibéré de la droite de proposer en 2012 une version modernisée de la constitution de 1815. On ne demandera pas aux constituants de gauche de boycotter une assemblée dont il n'y a plus rien à attendre. Les jetons de présence qu'ils y gagnent, et dont ils reversent une partie à nos organisations, nous seront utiles pour financer la campagne du « non » au projet de constitution qui sortira de se souk. A lui seul, ce paradoxe résume la foirade du processus de révision constitutionnel genevois : la part qu'y prendront encore les élues et les élus de gauche n'a sans doute plus pour seule utilité que celle de nous donner les moyens de combattre le résultat probable de l'exercice auquel nos élus auront tenté de participer.

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