jeudi 17 avril 2008

Quand la réalité excède le droit : Une nouvelle Constitution pour le tiers de Genève ?

La Constitution actuelle (celle de 1847) nous vient d'un temps où la charte fondamentale de la République organisait un territoire politique qui correspondait au territoire social, économique, démographique. Un temps où la commune de Genève rassemblait plus des deux tiers de la population de la République de Genève. Aujourd'hui, le territoire politique et le territoire social- sont disjoints : la commune rassemble certes, encore, 40 % de la population du canton, mais Genève a fait éclater ses propres frontières cantonales. La Constitution de la République ne s'applique plus que sur le tiers du territoire de la Genève physique, n'abritant plus que la moitié de la population de la Genève réelle. Si une nouvelle Constitution restait muette sur cette réalité, elle ne serait qu'un morceau de texte pour un morceau de Genève.

Ce que la politique ne fera pas, l'économie le fera. Toute seule.
La Genève que décrit la Constitution de 1847 tient en deux espaces politiques : la République et la Commune. Un siècle et demi plus tard s'impose une troisième entité, politiquement non identifiée mais réellement déterminante : la région urbaine. La moitié de la population genevoise vit déjà hors des limites politiques où s'applique la constitution genevoise. Et dans vingt ans, ce seront les deux tiers des habitants de la région genevoise qui vivront sur un territoire où les normes de la constitution genevoise ne peuvent s'appliquer directement, parce qu'il est le territoire d'un autre canton, ou d'un autre Etat. Sans élaboration d'un espace politique nouveau, la construction de la région sera livrée aux seules règles et aux seuls flux économiques. Or le seul niveau institutionnel existant, à partir duquel créer un espace politique démocratiquement défini et couvrant la région, est la commune. Parce que c'est le seul niveau institutionnel commun aux deux cantons et aux deux Etats qui se partagent la région genevoise. C'est donc à partir des 200 communes de la région, autour d'une Ville de Genève qui en est l' " incontournable " centre géographique, social, culturel et historique, que pourra se constituer un espace politique régional. Et si la Constituante à venir n'en tient pas compte, la Constitution qu'elle réussira peut-être à pondre sera aussi pertinente face à la réalité genevoise que les ordonnances somptuaires de la République calvinienne face aux réalités du marché de la montre de luxe.

jeudi 3 avril 2008

Election de la Constituante : Qui n'a pas sa liste ?

" Les patrons se jettent dans la bataille de la Constituante ", annonce la " Julie ". Les organisations patronales vont présenter une liste à l'élection de la Constituante, liste soutenue par les syndicats patronaux, la Chambre de commerce, les banquiers privés la Chambre immobilière etc... De quoi inquiéter les partis de droite, surtout que, comme toutes les autres listes, de gauche, de droite, et du centre, la liste patronale va jouer " l'ouverture ". Une ouverture idéologiquement encadrée, cependant : pour être candidat sur la liste patronale, faudra s'engager à défendre la libre entreprise, la gestion " économe ", les réductions d'impôts, et combattre les nouveaux droits sociaux et politiques que la gauche insatiable tentera d'inscrire dans la constitution.

Quorum piégeur
Une liste patronale va donc, à droite, s'ajouter aux listes des trois partis de l'Entente, de l'UDC et du MCG, éventuellement des " Démocrates Suisses " (l'ex-Action Nationale) et de " Halte aux déficits "... La gauche ne sera pas en reste de dispersion : aux listes socialiste et verte devraient s'ajouter une liste de SolidaritéS, qui part toute seule sans ses ex-alliés d' " A Gauche Toute ", plus au moins une, sinon trois, liste(s) des communistes, du Parti du Travail et des Indépendants, plus peut-être une liste syndicale et une liste " associative " puisant leur électorat dans l'électorat de gauche. Total : déjà une quinzaine de listes, à six mois de l'élection. Certes, le quorum pour l'élection a été fixé à 3 %, mais c'est tout de même un quorum, qui représente, dans l'hypothèse d'une participation médiocre deux ou trois mille listes. Or l'élection est à la proportionnelle des listes et si vous ne trouvez pas au moins 2000 personnes pour voter pour votre liste, et pas seulement pour vos candidats, vous vous retrouvez dans les poubelles du dépouillement. Ce quorum de 3 %, seuls le PS et les Verts, à gauche, et les libéraux et l'UDC, à droite, sont assurés de l'atteindre Et ces quatre partis vont à eux seuls capitaliser au moins la moitié des suffrages, la douzaine d'autres listes en concurrence devant se battre pour le solde, ce qui les met toutes (même celles du PDC, des radicaux et de SolidaritéS) sous la menace de sombrer au-dessous du quorum, compte tenu de la dispersion des votes que va entraîner la multiplication des listes. Il serait finalement assez comique que les amateurs de Constituante " ouverte " se retrouvent avec une assemblée composée de quatre groupes formés de représentants patentés, cumulards ou ressuscités, des seuls quatre principaux partis genevois…